Des abeilles devenues addictes aux sucres raffinés ?

Des étals des boulangeries au lieu des fleurs

Après les sécheresses à répétition, l’automne est l’ultime occasion pour les pollinisateurs de bien se préparer à l’hivernage. Le lierre couvert de fleurs attire une assemblée disparate. Mouches, guêpes, abeilles mellifères et solitaires, papillons, punaises, et petits coléoptères viennent s’y bousculer et se délecter de nectar et de pollen.
Au trou de vol de nos ruches quelques scènes de pillage surprennent. Elles nous montrent que, comme toujours dans la nature, les animaux, insectes compris, choisissent la voie de la facilité. Ceux qui prétendent que les abeilles sont programmées pour travailler dur en sont pour leurs frais ; elles ne sont laborieuses que si les circonstances l’exigent… D’ailleurs, que se passe-t-il à la pâtisserie toute proche ? À l’instar des guêpes, leurs cousines, voilà que les abeilles habituées au sirop se mettent à fréquenter les étals sucrés des boulangeries-pâtisseries et autres salons de thé… Se pourrait-il qu’elles soient devenues addictes aux sucres raffinés industriels ?

dessin Philippe abeilles

Un apiculteur industriel distribue plus de sucre dit « de nourrissement » à ses abeilles qu’il ne récolte de miel

Ce n’est pas impossible, lorsque l’on sait qu’aujourd’hui un apiculteur industriel distribue plus de sucre dit « de nourrissement » à ses abeilles qu’il ne récolte de miel, on est en droit de se poser la question ! En cause, la généralisation des nourrissements spéculatifs d’hiver pour booster la colonie et en faire une « vache à miel » et l’apparition de
périodes de famine qui s’enchaînent à un rythme de plus en plus soutenu (réchauffement climatique et raréfaction des ressources mellifères). Autant de pratiques et de facteurs conjugués qui incitent à des nourrissements répétés dits eux « de substitution » (sous-entendu aux fleurs mellifères).
Quid dans ce cas de la qualité des miels récoltés ? Elle devient aléatoire, car dès lors que l’on prive la ruche de ses réserves après chaque miellée et qu’on les remplace par du sucre industriel, le miel n’en est plus. C’est ce que constate le laboratoire d’analyses d’un grossiste vendeur de miel de qualité*, installé au pied des Pyrénées. Désormais, il refuse de commercialiser 37 % des lots de miel non conformes à ses exigences, car contenant des résidus pesticides et/ou des pourcentages trop élevés de sucres raffinés !
Plus grave, beaucoup d’apiculteurs prétendent qu’il n’y aurait plus d’apiculture possible sans soins intensifs ! Ce qui, de fait, sous-entendrait qu’il n’y aurait bientôt plus non plus de miel pur nectar… Heureusement, ce constat n’est pas une fatalité.

Des solutions existent

encore faut-il oser remettre en cause les sacro-saints dogmes de la production intensive et emprunter d’autres voies plus sages. C’est ce que font nos contributeurs, apiculteurs professionnels et vétérinaires dans ce dossier « Nourrissement : du sucre sans état d’âme ». Non seulement ils décortiquent les tenants et aboutissants d’une problématique qui révèle au grand jour les dérives d’un système qui va dans le mur, mais surtout, ils apportent des solutions concrètes pour éviter de tomber dans ce cercle vicieux. Il ne reste plus aux pouvoirs publics qu’à prendre leur responsabilité et à imposer une transparence d’étiquetage « miel produit avec ou sans sucre », pour éviter que le consommateur ne soit à nouveau le dindon de la farce…

Article à retrouver dans le quatrième numéro de la revue Abeilles en liberté

2 Comments

  1. Bonjour,

    Lorsque vous dite :

     » Elle devient aléatoire, car dès lors que l’on prive la ruche de ses réserves après chaque miellée et qu’on les remplace par du sucre industriel, le miel n’en est plus. C’est ce que constate le laboratoire d’analyses d’un grossiste vendeur de miel de qualité*, installé au pied des Pyrénées »

    Vous citez sans la citer la famille michaud… Numéro un du miel d’importation et autre sucres végétal. C’est un industriel et les analyses que produise leur machines détectant les sucres étranger dans le miel n’ont d’autres intérêt que de vendre avec un argument supplémentaire de « qualité ».

    J’ai du mal à comprendre qu’un collectif comme le votre défendre un tel distributeur…

    Bonne journée
    Robin apiculteur en Ardèche

    • Bonjour, merci pour votre message, nous tenons compte des lectures critiques. Vous aurez compris en nous lisant que le miel d’importation n’est pas encouragé par notre revue.. Dans cet article il ne s’agissait en aucune façon de défendre un marchand de miel, mais bien d’évoquer la nécessité des contrôles. Nous ne sommes pas dupes des pratiques de certains industriels mais la présence du sucre dans le miel est une réalité que la filière elle-même reconnait. Par ailleurs, le laboratoire en question est agréé France AgriMer : nous ne disons pas que cela est suffisant mais leur travail ne peut se réduire à du simple marketing : ces mesures renvoient bel et bien à la réalité de l’apiculture intensive d’aujourd’hui et aux conséquences de ses pratiques.

Les commentaires

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